Mercredi, 9 septembre 2015
Francine Pelletier
Chloé Sainte-Marie - La marche à l'amour
Pendant les vingt années de sa maladie, le cinéaste Gilles Carle a pu compter sur le soutien sans faille de sa compagne, l’actrice et chanteuse Chloé Sainte-Marie.
Montréal, 1982. Une jeune femme traverse le carré Saint-Louis, un portfolio sous le bras. Elle cherche la maison du cinéaste Gilles Carle pour lui remettre des photos. Elle vient armée de la prémonition qu’elle est destinée à rencontrer cet homme après avoir vu son film Fantastica, il y a deux ans. Elle a dix-huit ans et la vie devant elle. Une demi-heure plus tard, elle est enfin assise aux côtés du cinéaste dans un café du quartier. Ils sont interrompus par un grand gaillard à lunettes. À la manière d’un troubadour de fin de siècle, Gaston Miron s’amène, les bras en croix:
par le mince regard qui me reste au fond du froid
j’affirme ô mon amour que tu existes
La table était mise pour une grande histoire d’amour. Grande histoire il y aura. « Je suis rentrée avec lui ce soir-là et ne suis jamais repartie », dit l’ancienne jeune fille, aujourd’hui âgée de cinquante-deux ans, l’âge exact de son amoureux au moment de leur rencontre. Ce soir-là, Gilles Carle lui offrira une ligne de coke avec un billet de 100$ roulé serré, toutes choses qu’elle n’avait jamais vues, tout comme Gaston Miron, d’ailleurs. Il prendra des photos d’elle nue, qui seront admirées dans une exposition de leur vie à deux, trente ans plus tard. Dans les mois qui viennent, il ira jusqu’à la baptiser d’un nouveau nom. « Tu vas t’appeler Chloé Sainte-Marie », déclare-t-il de son perchoir d’artiste. Adieu Marie-Aline Joyal de Saint-Eugène-de-Grantham. C’est la fusion, l’obsession. « On était tout le temps ensemble; on ne se quittait jamais. J’ai été heureuse avec cet homme-là », dit-elle avec les mêmes beaux yeux verts de toujours.
Voilà pour le conte de fées. Gilles Carle et Chloé Sainte-Marie vécurent vingt- sept ans ensemble, mais seulement cinq ans dans l’insouciance et la bonne santé. Déjà, en 1987, «son corps ne répondait plus», dit Chloé. [...]
Ce texte est un extrait du texte publié dans le numéro 309 de Liberté. Pour lire ce numéro en version intégrale, visitez notre boutique.
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